Étude de la musique des donjons de « Link’s Awakening »

À propos de ce dossier

Une plongée musicale au cœur des pistes de donjon de « The Legend of Zelda: Link’s Awakening ».


Niveau 7 : Tour du Vautour (La piste boucle à 1:45.)

La tour du Vautour possède la plus longue boucle musicale parmi celles des huit donjons — en partie en raison de la très longue section d’introduction, qui fait intervenir un ostinato répété six fois :

Partition de l’introduction du thème

Notez comment celui‐ci commence d’une unique voix, augmente de volume et ensuite s’affaiblit en même temps qu’il se scinde en deux voix distinctes décalées l’une de l’autre. Encore une fois, l’« effet Dents de la mer » est obtenu grâce à l’ostinato qui passe du flou au net.

Quand la voix supérieure arrive finalement à 0:45, la construction harmonique complète de la piste se dévoile — et il s’agit, évidemment, de l’accord du Rêve :

Apparition de l’accord du Rêve dans la partition.

La piste se termine à 1:30 par une petite parenthèse musicale renvoyant au motif bleu — c’est véritablement la dernière fois qu’on le voit.

Partition de la parenthèse musicale à la fin du thème (avant qu’il ne recommence)

Niveau 8 : Roc de la Tortue (La piste boucle à 0:39.)

Si la tour du Vautour disait au revoir au motif bleu, le roc de la Tortue en fait de même avec le triton. En réalité, le thème du roc de la Tortue n’est constitué de guère plus que des tritons arpégés et répétés qui montent et qui descendent sur la portée. De la même manière que dans le temple du Masque et la tour du Vautour, l’« effet Dents de la mer » est produit ici par la présence de deux voix qui se synchronisent et se désynchronisent.

Début de la partition du huitième donjon du jeu

D’autres réflexions sur cette piste : l’arpège ascendant et répété de quatre notes est très semblable au thème des donjons du tout premier Zelda — bien que les notes aient ici été modifiées pour bien mettre en relief les tritons.

Pensées conclusives

Plus que n’importe quel ensemble de pistes provenant d’un Zelda pré‐3D, les huit donjons de Link’s Awakening me semblent illustrer une composition très confinée et une utilisation créative du son qui seraient difficiles à réitérer de nos jours du fait des options bien plus nombreuses offertes aux compositeurs.

Alors que l’on considère habituellement les motifs sur le plan de la mélodie (comme ici le motif bleu), les pistes de donjons de Link’s Awakening sont en fait plutôt reliées entre elles par des motifs harmoniques — par la couleur harmonique du triton et plus tard par l’« accord du Rêve » (mineur avec une septième majeure). Elles sont aussi caractérisées par un effet musical qui existe indépendamment de la mélodie et de l’harmonie — l’« effet Dents de la mer » — et qui peut être produit de bien des manières, en jouant notamment sur la durée des notes, les nuances, la longueur des phrases et plus encore. À mes yeux, les nombreuses façons de produire l’« effet Dents de la mer » au sein de ces pistes apportent beaucoup d’intérêt et de profondeur qui n’aurait pas été là autrement.

— Et cela conclut cet article de déconstruction. J’espère que vous l’avez trouvé intéressant et instructif, et qu’il vous permettra d’apprécier encore davantage ces pistes que j’affectionne tant.


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Dossier réalisé par Zelink, le 08 avril 2017

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À propos de l'auteur :
Je soule mon monde pour des écarts typographiques d’une insignifiance consensuelle. Le vice des points a corrompu jusqu’à mes écrits les plus informels. Ce que je fais de bien, c’est comme cette rime : de l’accidentel. (Af, là, ça sonne pas naturel.)